Le bilan 2017

Par Valéry K. Baran.

Avec un peu d’avance, je fais mon bilan 2017, parce que cette année a été une année riche en remises en question (eh oui !) et évolutions (bien sûr) en tant qu’autrice, et que… eh bien, j’ai pas mal de choses à raconter, en fait.

Pendant 3 ans, j’ai fait mes bilans annuels autour de 3 objectifs, toujours les mêmes (à peu de nuances près) et qui représentaient mes aspirations en tant qu’autrice, à partir du moment où je suis entrée dans l’édition. Ils étaient :

  • Progresser,
  • Aller à la rencontre d’un nouveau public / Faire ma place en tant qu’autrice / Partager (celui-ci était le seul changeant chaque année, et c’est à mon avis significatif),
  • Vivre l’aventure.

Que des chouettes objectifs, donc. Et, effectivement, durant ces 3 années, ils étaient justes, et ils me représentaient dans mon parcours, y compris dans ce changement régulier de formulation de ce deuxième objectif qui dit quelque chose du fait que c’est sur ce point-là que s’est joué ma remise en question, finalement.

Cependant, cette dernière année, j’ai vécu une remise en question. Un passage à vide avec un besoin énorme de prendre de l’air à un moment donné, et de lâcher, et de m’interroger sur mon positionnement en tant qu’autrice, parce que j’avais alors le sentiment de m’être perdue, noyée dans mon avancée vers un horizon qui, bien sûr, ne se rapprochait jamais. C’était quelque chose qui couvait, déjà, depuis l’année dernière, mais qui s’est vraiment exprimé cette année, avec le besoin de me poser les bonnes questions et surtout de trouver les bonnes réponses. Le système éditorial reste un bulldozer pour de nombreux auteurs, et j’avais le sentiment d’avoir mis de côté des éléments essentiels à mon bien-être d’autrice pour un résultat dont je n’étais pas si satisfaite, un besoin de me libérer de contraintes que j’avais l’impression de m’être imposées moi-même. Je ne parle même pas forcément de contraintes imposées par un éditeur en particulier parce que c’est plus gros : c’est tout le système éditorial, et commercial, et d’image, qui peut nous donner le sentiment de nous contraindre à un costume un peu trop étriqué, parfois. Et de me re-centrer sur l’important.

J’ai vraiment éprouvé le besoin de faire le point. Sur tout. Sur l’importance de l’écriture dans ma vie. Sur la place de l’édition dans ma passion. Et ce que je veux. Et ce qui est important pour moi. Et comment je veux vivre cet amour pour l’écriture que j’ai et à quel point il importe dans ma vie…

Il y a eu une nuit, particulièrement, cet été, alors que j’étais en Croatie, dans un cadre magnifique et durant des vacances de rêve (pourtant), et où je me suis levée à 4h du matin parce que je ne pouvais plus dormir, et que j’avais tellement de pensées et d’interrogations qui me venaient que je me suis écrit à moi-même un email pour les drainer et aussi pouvoir les reconsidérer avec la tête plus froide à mon retour. Et, quand je l’ai relu, il y a eu une phrase qui m’a paru particulièrement pertinente, et autour de laquelle s’articulait une partie de ma réflexion. La phrase n’est pas de moi mais elle m’avait marquée et, aujourd’hui encore, elle me parait pleine de sens dans la mesure où elle touche parfaitement à ce qui est, pour de nombreux artistes, difficile à partir du moment où ils entrent dans un univers commercial. Et voici ce qu’elle disait :

N’importe quel commercial vous le dira : il ne faut pas chercher à vendre ce qu’on a créé mais créer ce que l’on veut chercher à vendre.

Alors, je sais que ça peut paraître hors sujet et, pourtant, ça illustre  totalement l’aspect schizophrène qu’il y a dans le rapport de l’artiste à la question commerciale, le rapport de l’auteur à l’éditeur, et que l’on a tous à partir du moment où on entre dans un domaine professionnel ou semi-professionnel. Qui ne s’est jamais demandé « pourquoi est-ce que ce roman-ci marche alors que cet autre est tellement mieux ? » ? Qui n’a jamais vu un auteur dépité même de voir que cette œuvre, qu’il a écrite lui-même, est beaucoup plus reconnue que telle autre dans laquelle il se retrouve pourtant tellement plus ? Et c’est vrai dans tous les milieux artistiques. J’entendais tout à l’heure un comique ironiser sur les prix de Jul et Maître Gims aux Victoires de la musique. Oui… Qui ne s’est pas interrogé sur le succès de ces artistes en comparaison de ce que font certains autres, et c’est vrai pour le cinéma, aussi, et toutes les pratiques artistiques d’une manière générale.

Le fait est que le créateur/l’artiste est, dans son travail de création, à l’opposé d’une démarche commerciale, que souvent il aspire même à faire quelque chose qui n’a été fait par personne d’autre auparavant, aussi utopique que ce puisse être, ou au moins original, écrire avec ce qu’il est, lui, sa particularité, son approche propre… L’auteur ne crée pas pour « vendre » la plupart du temps. Et pourtant, il voudrait aussi que ce qu’il a écrit soit lu. Or, quand on est édité, ça passe par se vendre, forcément. Par le fait que son œuvre soit soutenue, distribuée, et vendue par son éditeur. Par le fait que l’éditeur veuille investir sur cette œuvre, et donc investir financièrement.

Tout le nœud du problème de cet aspect commercial, pour un auteur, est là. On veut tous écrire ce qui nous fait envie. Ce qui nous s’éclate, ce qui nous fait triper, nous amuse, nous défoule, ce que l’on trouve grand, beau, fort, en matière de création… On veut tous faire quelque chose de différent. L’éditeur, lui, a besoin d’un produit qu’il va vouloir vendre. Ce sont deux approches très différentes. Et, en tant qu’auteur, à moins d’être soi-même dans une logique commerciale de « production du produit qui a le plus gros potentiel de vente » (logique dans laquelle l’auteur devrait d’ailleurs être s’il compte vivre de sa plume), ces deux approches ne se croisent pas, sauf cas magique où ce que l’auteur a envie d’écrire correspond pile poil ce que l’éditeur cherche à vendre, et c’est là généralement qu’on voit des auteurs-vedettes émerger. Mais encore faut-il alors que l’auteur ait envie d’écrire toujours la même chose, parce que l’édition aime aussi créer des « produits » que sont les auteurs eux-mêmes, et que ça ne marche que si ceux-ci restent bien dans le genre d’écriture et l’approche que l’on attend d’eux.

Bref, c’est la réflexion à laquelle je suis arrivée : même si j’ai la chance d’aimer écrire un genre populaire (l’érotisme et la romance se portent bien), je n’aspire pas personnellement à « vivre de ma plume », j’ai aussi mes particularités dans mon approche en tant qu’autrice, et j’ai surtout beaucoup plus besoin de partager et de m’éclater que de vendre, en fait. Je ne cherche pas à écrire des livres qui ont un potentiel commercial particuliers, d’ailleurs, parce que sinon je peux vous dire que je sais parfaitement ce que j’écrirais, et comment, et à quel rythme. Pourtant, comme tous les auteurs, j’ai besoin d’écrire pour mon bien-être, j’ai besoin de partager ce plaisir là, et j’ai besoin d’être lue. C’est déjà beaucoup.

Du coup, voilà où j’en suis arrivée :

J’ai pris la décision, claire et nette, de ne plus rien publier chez éditeur qui ne soit passé auparavant par la publication sur le net.

Harlequin m’a fait un superbe cadeau en me permettant de pré-publier la suite de L’initiation de Claire sur Wattpad et je remercie très chaleureusement mes éditrices, parce que c’était exactement ce qui me fallait, alors, et ça m’a donné l’occasion de renouer avec cette publication que sur le net que j’avais laissée avec difficulté de côté.

Je l’avais dit dès mon premier bilan d’entrée dans l’édition, d’ailleurs : la publication sur le net me manquait. Ça, c’était vraiment le sacrifice que j’avais fait pour pouvoir découvrir cet univers de l’édition, mais l’échange, en cours d’écriture, avec les lectrices, a continué à me manquer, l’aspect très fun de connaître leur ressenti au fur et à mesure de l’avancée de mon roman, la possibilité de me nourrir de leurs avis pour progresser ou retravailler ce qui le méritait… Pour moi, c’était vraiment quelque chose dont je me privais. J’adore toutes les formes d’échanges avec les lectrices, et les avis des blogueuses littéraires sont en particulier « le » cadeau que je trouve le plus formidable dans l’édition, je tiens à le dire, mais j’avais aussi besoin de cette deuxième forme d’échange, soit celui que l’on peut avoir avec cette publication en cours d’écriture sur le net, sans devoir fournir forcément un travail fini, sans être face à un roman que je ne peux alors plus retravailler, et avec tout le côté fun, léger, amusant, et la proximité dénuée de pression qu’il peut y avoir là-dedans.

Et ça m’amène au deuxième point :

J’avais absolument besoin de ça. Et j’ai évolué dans mon rapport à l’écriture par rapport à ça, d’ailleurs. Ne plus chercher à travailler ma prose à outrance, prendre de l’air, laisser respirer mes phrases, me permettre plus de langage parlé, publier sur le net un travail encore perfectible, ne plus relire 250 000 fois, cesser de penser que ça ferait forcément quelque chose de mauvais, cesser de vouloir me cacher en abordant des thèmes trop éloignés de moi, me servir de l’écriture pour « cracher » certaines choses, aussi, me permettre de puiser un peu plus dans mes tripes, me libérer de certaines contraintes dans les thèmes abordés et les traitements de certains sujets… J’ai en particulier relu un article que j’avais écrit il y a encore 3 ans et où j’expliquais pourquoi je ne pourrais jamais réussir le NanoWrimo, soit ce défi dans lequel il faut écrire 50 000 mots en un mois et, honnêtement, ça m’a fait « pitié ». Je l’ai supprimé, du coup. J’y parlais tellement de mes limites et de mes incertitudes quand à ce que j’écrivais… J’ai eu envie, besoin, d’exploser tout ça.

Alors, je ne suis pas passée d’un extrême à l’autre parce que, vous le savez, je faisais déjà ça, avant (bousculer les codes, notamment), mais je me suis permis de me lâcher encore plus à ce sujet. J’avais laissé tomber les appels à textes parce que je voulais me concentrer sur mes objectifs et qu’ils étaient devenus une contrainte, pour moi, et je me suis permise d’y re-jeter un œil mais en mode « amusement », parce que décider de ne plus en faire du tout était une autre forme de contrainte, finalement. Le dernier AT de la Musardine m’a tentée, j’ai décidé sur un coup de tête d’y participer et j’ai eu le plaisir de faire partie des sélectionnés. Pourtant, j’ai écrit la nouvelle que je leur ai envoyée en deux après-midi. Peut-être 2 ou 3 heures d’écriture, le premier jour, la même chose le deuxième en relecture, et voilà, emballé. Et pourtant, je trouve ma nouvelle super sympa ! Et l’éditeur aussi, visiblement, vu qu’il l’a sélectionnée. Pareil pour le roman que j’écris actuellement : j’ai écrit les 30 000 premiers mots en un mois et les 50 000 suivants en un autre mois (le fameux NanoWrimo réussi, cette fois !), avec plusieurs mois au milieu pour retravailler et revoir tranquillement ce que j’avais écrit, par contre : je ne lésine pas sur le travail total, mais voilà : je me permets plus de « respirer », au milieu. Et surtout de me faire confiance. Je me permets de me lâcher, et lâcher en matière de pression, aussi.

Et je peux le dire : ça m’a fait du bien à tous les niveaux. Dans mon écriture, qui a gagné dans cette approche plus spontanée, plus fraîche, même si je sais aussi que je peux me le permettre aujourd’hui parce qu’il y a les années de travail et de pratique précédentes, bien sûr. Je n’aurais pas pu faire ça d’emblée. Mais là, il était temps : de lâcher, ainsi, de retrouver plus de spontanéité.

Et dans ma vie d’autrice. J’ai notamment pris… je ne sais plus, 3 mois sans écrire (c’était autour de la Croatie), mais c’était une très bonne chose. Je le sentais : j’en avais vraiment besoin. C’est pour ça que je n’ai pas hésité à écouter ce besoin, d’ailleurs. Ça a été ma période de remise en question, que je devais faire. Je n’ai pas voulu dédicacer au salon de la YCon, non plus : mon éditeur me l’a proposé mais je n’en avais pas envie, j’avais juste envie de profiter du salon et des copines, et de m’amuser, et j’en suis ravie ! Et je me suis même permis, dans ma vie d’autrice, d’entamer un projet complètement fou et délirant qui n’a d’autres vertus que de me distraire et de me faire rire, et dont je vous parlerai dans quelques temps, promis, mais pour l’instant… motus et bouche cousue.

Et on en vient aux décisions :

Avec Hope, on a décidé de faire ça (enfin, j’ai embarqué Hope avec moi, pour ne pas changer), et j’ai embarqué aussi Magena, ma formidable bêta et aussi une excellente autrice que j’adore, en sachant que non seulement on s’entend vraiment bien toutes les trois et on est habituées, depuis des années, à bosser ensemble, mais on a aussi une approche de l’écriture/un style/des thèmes très très proches toutes les trois.

Et donc, à partir de janvier, c’est décidé : on ouvre un site de publication de nos textes sur le net !

Alors, si vous avez déjà connu feu-Yasha no Naruto (de l’époque où on écrivait toutes trois des fanfictions), eh bien c’est le même principe : un site, sur le net, sur lequel on publiera toutes nos histoires, à un rythme sympa, sans prise de tête, gratuitement, bien sûr, avec une newsletter pour être tenu au courant des nouveautés (avec même des opportunités offertes aux inscrit.e.s !), et dédié uniquement à ça : pour vous, qui aimez ce qu’on écrit toutes les trois, pour nous, qui aimons partager ce qu’on écrit avec vous. Bref, revenir aux fondamentaux : l’écriture et le partage, avec cette dynamique si géniale et si forte qui est propre au net.

Quant au rapport à l’édition, il est tout sauf remis en question par ce nouveau projet. L’un ne remplace pas l’autre, mais ils vont se compléter. On pense toutes, et avec une très grande certitude, que la publication sur le net et l’édition chez éditeur ont tout à gagner à coexister. En discuter avec nos éditeurs ne nous effraie pas, du coup, et on compte bien le faire en toute transparence.

Quant au site, il viendra très vite parce qu’on commencera dès janvier ! Mais on vous redira ça.

Dans les News à venir très bientôt, sinon :

Alors, vous le savez, ce roman c’est mon bébé, mon amour, et je n’en pouvais plus d’attendre qu’il finisse de sortir enfin, et le voilà. Il sera publié en 4 épisodes chez HQN, avec une intégrale de la saison 1 qui sortira en même temps, mais je vous redirai ça début janvier aussi.

Ce que je peux dire, déjà, c’est que je suis vraiment fière de cette deuxième partie et fin, et qu’elle a énormément plu à toutes les personnes qui l’ont lue sur Wattpad, parce que ça a été une expérience incroyable sur cette plateforme, alors que j’y débarquais, pourtant. Je ne vous sors pas les chiffres de nombres de lecture, votes, commentaires, et toutes les interactions possibles sur cette plateforme, mais, vraiment, ça a été un truc complètement dingue.

Donc, voilà pour le petit bilan, sans objectifs, cette fois. Sans pression, sans stress, avec que du plaisir, de l’échange avec vous tou.te.s et du bonheur partagé. C’est tout ce que j’attends de cette future année.

Par contre, il va s’y passer plein de choses très chouettes et fun !!! Mais ça, on en reparlera petit à petit dans d’autres News.

Et bonnes fêtes de fin d’année à vous tou.te.s !

Val.

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